Près de Lyon, les ouvriers de Saint-Gobain en grève pour sauver leur usine centenaire

Le groupe Saint-Gobain prévoit de fermer en 2023 son usine de Vénissieux près de Lyon et ses salariés se mobilisent dans l'espoir de sauver le site, actif depuis 124 ans.

Le fleuron français des matériaux de construction pense boucler "à l'automne" les discussions sur le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) visant reclasser les 64 salariés au sein du groupe ou à l'extérieur, selon une porte parole du groupe jointe jeudi par l'AFP.

Quelques dizaines de salariés ont tenu jeudi un piquet de grève devant le site "Savoie Réfractaires".

"On nous a annoncé la fermeture du jour au lendemain, avant les vacances d'été, on a tous été choqués, on ne s'y attendait pas", souffle Christophe Vettraino, 26 ans de boîte.

Le site de Vénissieux, qui produit des matériaux réfractaires à même de supporter des chaleurs extrêmes "perd de l'argent depuis plus de dix ans en dépit des actions mises en place et malgré deux recapitalisations", a indiqué à l'AFP Saint-Gobain.

"Recapitaliser c'est bien, mais il n'y a pas eu de vrais investissements et ils n'ont pas remplacé les départs" réagit Salah Atmani, délégué syndical Unsa de l'usine.

La pilule passe d'autant moins que le groupe présent dans 75 pays a quintuplé ses bénéfices en 2021 à 2,5 milliards d'euros.

"C'est une mort préméditée. Saint-Gobain profite du contexte actuel et des prix de l'énergie" pour justifier la fermeture, assène Gilles Degéa, secrétaire général de l'union locale de la CGT.

Selon plusieurs salariés, le groupe veut délocaliser la production en Asie ou aux Etats-Unis, régions moins dépendantes du gaz russe.

La porte-parole de Saint-Gobain assure pour sa part "ne pas avoir d'informations" sur une délocalisation et conteste que les coûts de l'énergie soient la cause de la fermeture.

Cependant, selon elle, "le contexte géopolitique et l'augmentation des coûts des matières premières et du transport ne permettent pas d'envisager une amélioration" de la situation de l'usine.

"Ce n'est pas aux salariés de trinquer", s'agace la maire communiste de Vénissieux Michèle Picard, présente auprès des grévistes pour sauver ce "patrimoine industriel".

"Saint-Gobain peut faire d'autres choix", ajoute-t-elle. D'autant que le groupe a annoncé en mars son intention "d'accroitre ses capacités de production en isolant en France" en investissant "120 millions d'euros" dans la production de laine de verre: "pourquoi ne pas le faire à Vénissieux ?", interroge Gilles Degéa.

Avec une moyenne de 26 ans d'ancienneté, beaucoup de salariés n'imaginent pas l'avenir ailleurs. "On est une famille, c'est ça qu'on va perdre", soupire Carlos Calvo, 53 ans.

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